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27 septembre 2011 2 27 /09 /septembre /2011 09:01
HAMED ET DARIUS

 

 

 

Ce soir  je vais tenter de vous narrer  la terrible et triste histoire d’Hamed et Darius.

 

Ce 17 Novembre 1896 à Port Saïd alors que depuis le petit matin tout n’est qu’effervescence et bousculades pour l’inauguration du Canal de Suez par l’impératrice Eugénie, deux enfants, un Egyptien et un Perse  pleurent à chaudes larmes la fin de leur belle amitié.

 

Hamed , fils de Tayeb , éleveur de vaches près de Fayid se rappelle ce qu’était sa vie avant que les hommes , les français, ne décident de relier les deux mers.

Il fallait à Darius et son père dix longs jours de marche à travers le désert du Sinaï pour venir jusqu’à lui.

Dix jours d’excitation à l’idée de retrouver celui qui, désormais, n’avait plus aucun secret pour lui, son frère de cœur : Darius le Grand, surnommé ainsi par son père,  amusé de le voir très souvent drapé dans une toge au blanc immaculé, imiter le grand Alexandre, lui le simple fils de marchand.

 

Et aujourd’hui , « L’Aigle » , ce navire  avec à son bord tout ce que la Compagnie des Messageries Maritime , la France et même l’Europe comptent de notables et d’officiels, qui consacre cette frontière désormais infranchissable pour eux, cette maudite frontière d’eau qui les sépare à jamais.

 

Dans les salons et jusque sur le pont du navire le champagne coule à flot.  Seule l’impératrice reste fidèle à sa boisson fétiche, l’hypocras, où ici au pays des pharaons, plus qu’ailleurs encore,  les épices soulignent la suavité du breuvage.

Elle s’amuse à compter les courbettes de certains pour tenter de faire bonne impression.

Rien n’est vraiment spontané dans le comportement de tous ces hommes,  bien au contraire,  tout semble n’être que calculs et apparences.   C’est le jour des grandes manœuvres, il y a des affaires à faire, à n’en point douter.

 

Des affaires,  sauf pour Hamed et Darius qui avec leurs cœurs d’enfants  ne comprennent même pas pourquoi aucun des 77 bateaux qui suivent « l’Aigle » ne jettent de filets à l’eau.

Il s’agit bien là d’une drôle de pêche, de drôles de navires, d’un drôle de monde.

 

Drôle de monde en effet que celui qui rend ce jour si funeste à leurs yeux,  un monde où un canal qui a été creusé pour rapprocher deux univers , en reliant deux mers , sépare à jamais deux enfants qui n’auront plus désormais comme lien que l’horizon de l’autre.

Une rive pour poser son regard et chercher,  sans jamais l’apercevoir, celui avec qui l’on partageait son plus grand trésor : la force de sa jeunesse, ses rires et ses espoirs.

 

Nul doute que lorsque Ferdinand de Lesseps eut le rêve un peu fou de faire traverser le désert par la mer, jamais ne l’effleura l’idée qu’avec cette construction  qui allait changer la face du monde maritime, il allait aussi changer le monde de deux enfants,  deux amis que le hasard de la vie avait fait naître chacun sur une rive.

 

 

 

LMN  - Août 2011

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